Les autorités libanaises ont choisi d'interdire la sortie du film de Marjane Satrapi sur l'Iran des mollahs afin de ne pas irriter la communauté chiite, ni Téhéran. Une décision qui provoque la colère du quotidien L'Orient-Le Jour.
La censure libanaise a refusé le visa d'entrée au Liban de Persepolis, le film de Marjane Satrapi, nommé aux Oscars et Grand Prix du jury au festival de Cannes 2007, où l'auteure, elle-même iranienne, raconte sous forme graphique, sans agressivité aucune, la transformation de l'Iran au quotidien depuis l'avènement du régime des mollahs. Le ridicule ne tue plus que ceux qui le voient. A l'heure d'Internet, des satellites, des autoroutes de l'information, de la mondialisation tous azimuts, la censure, au Liban, vit dans une bulle aseptisée contre le "microbe de la civilisation". Un monde à part régi par des religieux, généralement ses meilleurs conseillers. Pour éviter tout problème et toute polémique pouvant irriter leur intégrisme aveugle, elle cède sur tout.
Persepolis est un film destiné au grand écran et donc pour le grand public. La censure pratique alors la politique de l'autruche. Elle édicte des interdits pour imposer une "moralité" et des pratiques mesurées à l'aune d'une civilisation qui n'est pas la nôtre, avec pour seule raison de ne pas déplaire à des "pays amis"… A la même heure, les satellites, qui prolifèrent comme des champignons, permettent, pour 10 dollars par mois et à des familles entières, de voir tout ce que l'Occident, ce "grand Satan", produit de bon ou de mauvais sans aucune limite que celle de la conscience de chaque individu. Dame Anastasie, là, ferme les yeux. Allez comprendre !
Interdire Persepolis, un livre, un CD qui ne soient pas conformes à une certaine culture, comme elle le fait depuis une bonne décennie, la démarche n'a rien d'innocent. Il s'agit bien d'une politique de grignotage des libertés destinée à plonger le pays dans les ténèbres, à l'isoler de toute ouverture, à lui greffer une culture qu'il rejette. Le Liban serait-il devenu la petite banlieue de Téhéran ? Serait-il déjà à l'heure iranienne pour défendre les mollahs et autres pasdarans pointés du doigt dans ce film ? Il appartient aux Libanais de choisir. Et de réagir.
Maria Chaktoura
L'Orient-Le Jour
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