Le Dakar, un terrain de jeu bon marché, par Gilles Van Kote
Comparaison n'est certes pas raison. Difficile, pourtant, de ne pas rapprocher les deux chiffres suivants. En 2005, trois incendies survenus à Paris, dans deux immeubles habités par des familles africaines et dans un hôtel, ont fait 48 morts, provoquant une polémique sur le logement social.
Depuis sa première édition, en 1978, le Dakar, rallye-raid imaginé par Thierry Sabine, a fait 48 victimes, dont son propre créateur, disparu en 1986. Dix-sept d'entre elles, toutes africaines, ne participaient pas à la course.
Peut-on imaginer ce qu'il serait advenu d'une telle épreuve si elle se déroulait en France ? Dans un pays qui se félicite d'avoir fait baisser de 5 km/h la vitesse moyenne des véhicules entre 2001 et 2004 et d'être passé sous la barre des 5 000 morts sur les routes en 2005, tolérerait-on de lâcher en pleine nature plusieurs centaines de concurrents pétaradants et de payer un tribut de deux morts annuels, sacrifiés sur l'autel de la vitesse ? Assurément, le Dakar ne serait plus.
Les organisateurs de l'épreuve laquelle y a perdu son appellation originale de Paris-Dakar ont renoncé à emprunter les routes hexagonales pour se replier sur le Portugal, l'Espagne et l'Afrique.
Le débat est aussi vieux, ou presque, que le Dakar. Dans les années 1980, déjà, le collectif Pa'dak, appuyé par René Dumont, le père de l'écologie, se battait pour faire cesser le massacre. Le CAJO (collectif anti-Jeux olympiques) a pris le relais : ses militants se sont rendus, le 13 janvier,
au siège d'Amaury Sport Organisation (ASO), société organisatrice de l'épreuve, pour lui remettre le "Prix de l'indignité humaine", symbolisé par un pneu maculé de sang. Quelques heures auparavant, un jeune Guinéen avait trouvé la mort, renversé par un concurrent du Dakar. Le lendemain, un
garçonnet était tué par un camion d'assistance, au Sénégal cette fois.
Aussitôt, comme à chaque fois qu'un tel drame se produit, organisateurs et concurrents se sont sentis obligés de se justifier, souvent maladroitement.
"En Afrique, on arrive dans des endroits où il n'y a rien et où les gens sortent de nulle part", a avancé Roger Kalmanovitz, responsable de la sécurité de l'épreuve. "Il faut connaître l'Afrique pour savoir ce que c'est : ils chantent, ils dansent, ils courent partout parce que c'est super pour eux, le rallye. Ils sont un peu inconscients", a déclaré au Journal du Dimanche l'ancien skieur Luc Alphand, vainqueur de l'édition dans la catégorie autos.
"Des accidents comme celui-ci, il en existe tous les jours au Sénégal, a précisé Alaouine Tall, vice-président de la Fédération sénégalaise des sports mécaniques. Nous serons heureux de continuer à accueillir le rallye dans le futur." Car le Dakar serait une bénédiction pour l'Afrique : c'est le dernier argument des partisans de l'épreuve, qui se gardent bien pourtant d'aller demander leur avis aux intéressés. Sont mis en avant l'enthousiasme populaire (réel), les retombées économiques (jamais
mesurées) et les actions humanitaires d'accompagnement.
Au prix de quelques chambres d'hôtel et forages de puits, avec le soutien de quelques élites locales, le Dakar offre à ses concurrents un terrain de jeu bon marché, dont le seul inconvénient est d'être habité par des "inconscients" auxquels vient parfois l'idée saugrenue de traverser une piste sans imaginer qu'un bolide pourrait survenir.
Pour ne pas fâcher, ne parlons pas de l'irruption obscène, dans des régions démunies, d'une caravane affichant ostensiblement sa puissance économique et symbolique, ni des effets dévastateurs d'un tel étalage sur les jeunes générations d'Africains. Réjouissons-nous plutôt pour Luc Alphand, qui espère que tout ça "ne va pas gâcher ce (qu'il a) accompli" et affirme que
mieux vaut disputer le Dakar que de rester à la maison. Sinon, "tu feras 120 kg, sur ton canapé, à bouffer des chips devant la télévision. Et tu crèveras", estime-t-il. Allez expliquer ça à la famille de Boubacar Diallo, 10 ans, mort le 13 janvier sur le bord de la route.
GILLES VAN KOTE
Article paru dans l'édition du 22.01.06
ET pendant ce temps... au ciné :
Jarhead - la fin de l'innocence
Et la série des bons films continue... Encore un film malin et comme le dit si bien L'Humanité c'st un film pacificiste sant pour autant tomber dans l'antimilitarisme primaire... Les acteurs sont superbes, les images toutes plaines de sens. Encore un bravo... Bref encore pas déçu du cinéma américain qui redonne une vrai raison au cinéma... un cinéma comme j'aime... A quand les mêmes films en France fait par des français ?
Il est là le vrai lien :
http://spaces.msn.com/members/breizhboy1975/
Rédigé par : Nicolas | 26/01/2006 à 18:46
voilà le lien: http://spaces.msn.com/members/breizhboy1975/Blog/cns!1pfTm4wPCLM16z92GipKD-Pg!168.entry?owner=1
Rédigé par : Soumia | 26/01/2006 à 16:26
ca marche pas le lien pour le blog de Nicolas
Rédigé par : jeanneazouki | 26/01/2006 à 12:08